L'usine ROLLIN
Une usine qui fait partie de l'histoire du village.

(Article paru dans le Bulletin Municipal 2007)

 

  Vous qui passez chaque jour devant les portes de l'usine Mac Dermid, savez-vous qu'une longue histoire lie cet établissement au village ?
 Pendant des décennies, le village a vécu au rythme de l'usine Rollin. Combien de Steinbachoises et de Steinbachois ont travaillé dans ces murs?


DES ORIGINES À LA GUERRE DE 1870 :

 L'origine de l'industrie caoutchoutière en Alsace remonte au milieu du XIXe siècle. C'est en 1844 que Mathieu RISLER, imprimeur d'indiennes à Cernay, créa dans cette ville une fabrique de caoutchouc.

Joseph ROLLIN, né à Cernay le 20 novembre 1820, débuta dans cette usine. En 1859, après avoir travaillé à Paris comme imprimeur sur tissus, il s'installa à Steinbach dans un ancien tissage pour y fabriquer des cretonnes et des manteaux caoutchoutés. A cette époque il employait 6 à 8 ouvriers et 20 à 30 couturières dans un atelier de 13 métiers où l'on tissait des cretonnes. L'épouse du  fondateur, Caroline ROLLIN, collaborait avec son mari dans la direction de l'atelier de couture. A la production des vêtements, Joseph ROLLIN ajouta bientôt celle de draps caoutchoutés spéciaux, dont les indienneries alsaciennes commençaient à se servir pour l'impression mécanique des tissus. La fabrication s'étendit ensuite aux balles, ballons, jouets d'enfants, ainsi qu'aux articles techniques pour usage industriel : joints, tuyaux et objets moulés en caoutchouc.

 DE 1870 À 1918
Le siège de Belfort, commencé le 3 novembre 1870, isolait Mulhouse et la Haute-Alsace du reste de la France.L'administration allemande s'installa en Alsace à partir de fin novembre. Le 10 mai 1871, le traité de Francfort proclamait la cession de l'Alsace et de la Lorraine.
Joseph Rollin continua à travailler pour les industries alsaciennes les plus diverses auxquelles son sort était lié, et notamment pour l'industrie textile et les manufactures d'impression sur tissus de la région de Mulhouse.
Joseph Rollin mourut le 5 janvier 1887. Quelques jours plus tard, la raison sociale de l'entreprise Rollin devenait l'« Elsässische Gummiwarenfabrik zu Steinbach ».
Les deux fils de Joseph Rollin reprirent l'entreprise. L'aîné,Charles Rollin, né en 1858 s'occupa de la direction technique et commerciale. Le cadet, Eugène Rollin, né en 1860, s'occupait plus spécialement du caoutchoutage des tissus.
En 1890, la durée journalière du travail était de 11 heures, et on ne travaillait pas le dimanche.
L'entreprise continua ses fabrications de tissus et articles techniques en caoutchouc. Elle fut ensuite la première a introduire les garnitures de cylindres en caoutchouc dans les machines de blanchiment, teinture et apprêt pour remplacer les rouleaux en laiton. De même, elle fabriqua les premiers revêtements de presses en caoutchouc pour l'industrie papetière.
Depuis ses débuts, l'entreprise avait gardé son caractère artisanal. A la veille de la première Guerre Mondiale, elle comprenait un gérant, un contremaître, un comptable et 30 ouvriers.
Après la terrible bataille de Steinbach, fin décembre 1914 et début janvier 1915, l'entreprise et le village furent complètement détruits. Jusqu'au retour de l'Alsace à la France en 1918, l'usine sinistrée se trouva sur la ligne de front.

1918-1939 - L'entre-deux guerres:
Après l'armistice de 1918, les habitants de Steinbach dispersés aux quatre coins de l'Alsace revinrent dans leur village. Tout n'était plus que ruines, trous d'obus, amas de ferraille et de fil barbelé. Il fallut tout reconstruire, maisons, église, écoles et usine. Le 8 mars 1920, la raison sociale redevenait
« Manufacture Alsacienne de Caoutchouc ».
A ses fabrications traditionnelles, l'entreprise ajouta à cette époque la fabrication de courroies de transmission plates et de bandes transporteuses. Charles Rollin étant décédé le 16 janvier 1926, ce sont André Rollin et Georges-Jean dit Yvan Rollin qui en prirent la direction. L'entreprise évolua alors
dans un esprit plus scientifique avec l'emploi de nouveaux produits ou procédés au fur et à mesure de leur apparition sur le marché : accélérateurs, antioxygènes, plastifiants et récupération des solvants. De plus. entre 1922 et 1939, des améliorations avaient été apportées chaque année aux
bâtiments et au matériel de l'usine. En mai 1939, à la veille de la mobilisation, l'entreprise comptait 79 personnes.

 DE 1940 À LA LIBERATION:
Après la débâcle et l'armistice du 25 juin 1940, la famille Rollin fut. comme en 1914, dépossédée de ses biens qui furent placés sous séquestre allemand.
En juin 1941, l'usine de Steinbach fut l'objet d'un contrat de location-vente au profit d'une société allemande qui occupa les locaux jusqu'à la débâcle allemande. Lors des combats de la libération, de novembre 1944 à février 1945, le front se stabilisa à nouveau devant le village. Des pièces d'artillerie
furent installées dans la cour de l'usine, ce qui attira les tirs des batteries alliées. De nombreux bâtiments furent à nouveau touchés, mais contrairement à la Première Guerre l'usine ne fut pas complètement détruite.
La famille Rollin put ainsi reprendre possession de l'usine dans les mois qui suivirent la fin des hostilités.

 L'APRÈS GUERRE :
Dans les années 50, l'entreprise Rollin a beaucoup évolué. En 1954, elle comptait 170 employés et vendait ses productions sur tout le territoire national, mais aussi à l étranger et outre-mer.
C'est l'époque où les gros investissements, nécessités par l'évolution des techniques du travail du caoutchouc et par les tonnages traités, ont été réalisés : mélangeurs à cylindres chauffés, puissants masticateurs, autoclaves et presses à vulcaniser, pont de 8 tonnes. C'est également l'époque où le laboratoire de recherches se développa, d'une part pour contrôler la qualité des matières premières et des produits finis, mais aussi pour innover, pour mettre au point de nouvelles méthodes ou de nouveaux produits, en relation étroite avec les clients. Ceci permit à l'entreprise de diversifier ses productions qui comprenaient des courroies de transmission, des tissus techniques, des articles boudinés et moules tels que tubes ou raccords pour l'industrie automobile, des rondelles pour appareils électromécaniques ou pour bocaux de conserves, des revêtements caoutchouc pour cylindres et autres pièces de machines, des feuilles pour joints et des tapis de sol.

LES ANNÉES ACTUELLES :
Dans les années 60, l'entreprise Rollin est l'un des leaders mondiaux en ce qui concerne la fabrication de draps d'impression. L'un de ses concurrents dans ce domaine est la société américaine Polyfibron. A la mort d'Yvan Rollin en 1961, sa femme Madeleine prend la direction de l'entreprise.
En 1969, la famille Rollin, souhaitant se désengager cède l'entreprise au groupe américain WR GRACE (dont Polyfibron faisait maintenant partie) qui devient ainsi leader mondial sur le marché du drap d'impression. M Jean Le Cannelier dirige l'usine de 1969 à 1976, date à laquelle il est remplacé par M. Gérard Loeb qui y restera jusqu'en 2004.

En 1979, le groupe ROLLIN GRACE décide de réorienter les activités de l'unité steinbachoise vers la production de garnissages de cylindres (pour le textile et le papier) et de blanchets d'impression (pour journaux, magazines et emballages). Un bâtiment (« le 46 », récemment acheté par M.Cattin) est construit à Steinbach pour abriter ces nouvelles activités.
L'entreprise emploie alors près de 350 personnes.

En 1989, afin de développer ses activités, ROLLIN GRACE construit dans la zone industrielle de Cernay une usine pour fabriquer des blanchets, des cylindres pour l'industrie papetière et des draps d'impression selon une nouvelle technologie thermoplastique, et ainsi répondre à la concurrence. Environ un tiers du personnel s'installe à Cernay. A Steinbach, la fabrication de cylindres petites dimensions et de draps d'impression se poursuit selon
l'ancienne technologie.

En 1995, alors que ROLLIN GRACE Steinbach-Cernay compte près de 500 salariés, le groupe américain décide de se séparer de toutes ses sociétés spécialisées dans l'impression. Une banque américaine rachète ces sociétés et crée POLYFIBRON TECHNOLOGIES. La même année, cette
entreprise revend les activités de garnissage de cylindres pour l'industrie papetière et, en 1998, le bâtiment 46 de Steinbach est fermé. Il ne reste sur place que le garnissage de cylindres textiles et les effectifs chutent d'une centaine à une quarantaine de personnes.

En 1999, POLYFIBRON TECHNOLOGIES, qui reste l'un des leaders mondiaux dans le domaine des activités offset, est absorbé par le groupe américain MAC DERMID. La division locale, d'abord baptisée GRAPHIC ARTS devient MAC DERMID PRINTING SOLUTIONS avec, à sa tête, depuis 3 ans, un PDG américain, Mr Dough Rich.

A Steinbach, la société MAC DERMID fabrique toute une gamme de produits adaptés à différents secteurs d'activités : textile, sidérurgie, industrie de transformation. Les domaines d'application sont extrêmement variés : adhésifs, emballage alimentaire souple, films et papier photo, bois et stratifiés, revêtements de sols et de murs, tissus, PVC et plastiques, essorage, encollage etc ....
Actuellement, il reste environ 35 personnes sur le site de Steinbach sous la direction de M. Vincent Lefer. De gros efforts ont été accomplis au niveau de l'environnement (suppression de l'évaporation des solvants dans l'atmosphère, par exemple).

Souhaitons longue vie à cette entreprise qui est chère au cœur de beaucoup d'anciens Steinbachois et qui pour eux reste « ROLLIN ».

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Tous nos remerciements à MM. José Risquez, André Waldner et Gilbert Zimmermann pour leurs contributions.